Miniaturistes

Derrière les murs d’une ancienne usine, dans un coin un peu oublié de Gand proche de la gare Dampoort, le plus grand projet de co-housing de Flandre est sorti de terre. Trois immeubles sobres et massifs aux formes malgré tout un peu excentriques de cinq à huit étages accueillent désormais 59 familles, une série d’espaces collectifs, un jardin partagé et un centre de santé de quartier. Le projet est signé Bogdan & Van Broeck. L’ensemble est un modèle particulièrement réussi de construction durable et éco-énergétique.

Tout a commencé par un concours organisé par SoGent en 2009 visant à réaffecter l’impressionnant complexe de l’entreprise métallurgique Malmar, dont les toitures en shed abritaient initialement l’usine textile Baertsoen en Buysse. Ce complexe jouxte le parc Bijgaarde au sud, le chemin de fer à l’ouest et la chaussée de Dendermonde à l’est. Les rails y pénétraient jusqu’à l’intérieur, là où se trouve actuellement le sentier Déborah Lambiotte.

Lorsque l’entreprise fut abandonnée en 1997, le terrain fut – comme souvent – morcelé. Au nord, une partie de l’usine a disparu pour céder la place à une « boîte à chaussures » de l’enseigne Hubo et à un parking. À l’est, une autre partie a laissé la place à des entrepôts d’Oxfam. À l’angle nord-ouest, un ensemble remarquable a été transformé en salle de fêtes. Côté sud, au-delà du sentier Lambiotte, tout a été démoli au bénéfice du parc Bijgaarde. Malgré tout, il subsistait un ensemble d’environ 0,7 ha, ceint d’un mur massif.

Déjà en 2009, le bureau Bogdan & Van Broeck avait proposé de conserver ce mur – et même de préserver toute une série de toitures en shed – pour que la mémoire des lieux reste vivante. À la pointe sud du terrain, qui forme un triangle, les couvertures des toits ont disparu, mais les membrures ont été conservées. C’est ainsi que sont nés des espèces de salons de jardin, qui donnent directement sur le parc Bijgaarde. Un sentier pédestre et cyclable, qui traverse le complexe en longeant un vieux mur transversal, marque la séparation entre les salons et le terrain côté nord. Celui-ci est devenu un lieu d’habitat à l’intérieur des murs de l’ancienne usine.

Préparer le terrain pour pouvoir y construire ne fut pas une sinécure. L’indispensable désenclavement d’un garage du côté du magasin Hubo fit par exemple l’objet de longues négociations. Il y avait en outre un élément crucial : la Ville avait décidé que le terrain situé à l’intérieur des murs de l’usine – un petit 0,5 ha – devait devenir un espace collectif avec des immeubles de hauteur modérée, destiné à du co-housing. Les candidatures pour ce projet furent ouvertes à partir de 2016.

Trois groupes décrochèrent la timbale et se mirent à l’œuvre. Cette phase, elle aussi, a dû être un travail de titans. Il fallait que les trois groupes s’accordent sur l’aménagement des différentes habitations à l’intérieur de chacun des complexes, de même que sur la part et la nature des espaces collectifs. C’est pourquoi chaque îlot a un aspect très différent des autres, bien qu’ils soient tous constitués du même matériau. Les habitants devaient eux aussi s’entendre sur l’espace entre les bâtiments, sur le style du mur entourant l’ensemble et sur d’autres points tels qu’un atelier et les places de parking. De plus, le centre de santé de quartier devait également y trouver sa place.

Le concept de Bogdan & Van Broeck a joué à cet égard un rôle important. Leur proposition d’un aménagement de base pour trois immeubles d’habitation semblait suffisamment flexible pour réunir tous les critères sans que cela nuise à la cohérence. Au centre de chaque îlot se trouve un vaste escalier en béton à ciel ouvert, flanqué d’un ascenseur. De cet ascenseur partent de larges sentiers qui mènent aux portes d’entrée des habitations individuelles. Il ne s’agit cependant pas d’appartements en galerie vu qu’il n’y a chaque fois que quelques portes qui donnent sur ces sentiers disposés en éventail. Cela permet de réduire au maximum les risques de conflits liés à l’intimité, tout en créant de beaux espaces de rencontre.

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