Le bookshop de Kanal, une pièce domestique urbaine
Central, Bookshop de Kanal, Bruxelles

Kanal, l’usine automobile qui devient musée, se transforme en ce moment-même grâce au travail de noArchitecten, Sergison Bates et EM2N. La démolition en cours révèle la structure métallique gigantesque de l’édifice lorsqu’on longe le boulevard nord de Bruxelles. Récemment, Kanal a fait l’objet d’un concours pour son futur bookshop qui contiendra les archives du CIVA. La proposition de Central architecture, Sophie Dars (architecte éditrice), Pierre Leguillon (plasticien) et Daidalos Peutz (acoustique) entreprend une réflexion, à la fois théorique et aboutie, sur le rôle du désormais incontournable bookshop au sein du musée. Leur projet a su convaincre le jury qui devait choisir parmi les propositions des différentes équipes d’Asli Çiçek, Nord, Traumnovelle, Hé! Architectuur et XDGA.

A travers trois niveaux d’intervention, le projet invite à percevoir le bookshop comme un espace public tout en intégrant l’intimité d’une pièce domestique. En prenant comme référence les prémices des salons littéraires et leur double usage, à la fois chambre à coucher intime et salle de réception publique, l’objectif est de rendre le lieu attrayant au plus grand nombre.
Le premier niveau d’intervention concerne le sol et les deux murs parallèles. Le sol est une supersurface. Une grille de points électriques se déploie, elle permet de brancher son laptop et de s’installer n’importe où on le choisit. Les deux murs parallèles sont aussi étagères et permettent de ranger et exposer les ouvrages. L’usage des étagères répond au ‘as found’, l’une est métallique comme le mur rideau qu’elle vient épaissir, l’autre en bois répond au mur maçonné contre lequel elle s’appuie. L’étagère métallique, “à la Munari”, est telle une vitrine et dévoile son contenu et ses potentiels. L’étagère en bois “à la Shaker” accueille quant à elle les archives et permet de suspendre des objets pour laisser la place au vide cadré par ces deux murs-étagères.
Le deuxième niveau, appelé “dispositifs-événements” est composé de quatre installations qui caractérisent des zones. Parmi elles, le scriptorium mécanique, sorte de longue table, devient aussi podium lorsque des événements ont lieu. Le foyer électrique apporte les conditions lumineuses favorables à la salle de lecture. Le kiosque informatif est une colonne d’affichage à la manière d’une colonne Morris parisienne, ce totem permet d’annoncer les futurs événements et sert de repère. La tente prospective, évoquant un abri, est propice à l’intimité d’une lecture.
Le dernier niveau d’intervention est une collection d’objets. D’une part le mobilier nécessaire pour ranger et exposer les livres. D’autre part les objets curatés, libres d’être déplacés et mobilisés, sans système immuable préétabli.
La proposition du musée Kanal, qui requestionne déjà le musée traditionnel et mue par un optimisme radical, est l’opportunité de perdurer cette dynamique en s’interrogeant avec autant d’intensité sur le rôle du bookshop. Au-delà d’un espace dicté par la consommation, la tentative de Central perçoit le potentiel social de ce lieu. Propice à plus de décontraction et d’échanges, c’est aussi un lieu capable d’offrir une certaine intimité.
