Triennale d’architecture d’Oslo 2019

Du 27 septembre au 24 novembre, avec Enough: The Architecture of Degrowth, la Triennale d’Architecture d’Oslo 2019 étudiera les alternatives à la croissance économique sur base d’une transformation radicale des initiatives culturelles, sociales et écologiques dans notre société.
Le sujet est brûlant d’actualité. Quelques jours à peine après le discours – qui a fait couler beaucoup d’encre – prononcé par Greta Thunberg lors du Sommet pour le Climat aux Nations unies à New York, où elle fustigeait les dirigeants et dénonçait leur impuissance à imaginer une alternative à un système capitaliste de croissance économique constante à l’impact catastrophique sur le climat, la Triennale d’Architecture d’Oslo s’ouvre sur le thème Degrowth – (Décroissance). Les commissaires du bureau londonien d’architecture et d’engineering Interrobang (Phineas Harper, Maria Smith, Matthew Dalziel et Cecile Sachs Olsen), retenus parmi 71 candidatures à l’Open Call for Curators en 2017, motivent leur thématique comme suit : « Nous avons vécu une année riche en événements politiques qui ont secoué les opinions et souligné l’urgence d’une action radicale pour arrêter le réchauffement climatique mondial. Persister dans une économie basée sur la croissance va aboutir à un effondrement climatique et générer un fossé toujours plus profond entre les plus démunis et ceux qui sont beaucoup trop riches. Nous explorons l’architecture de la Décroissance, une économie d’abondance partagée où l’épanouissement humain et écologique est prioritaire. Nous proposons une vision dans laquelle il y a assez pour tous. »
Cela se traduit par un programme riche et particulièrement diversifié comprenant une centaine d’événements avec, comme piliers fixes, The Library ou l’exposition centrale au musée de l’architecture ; The Theatre, une série de spectacles de théâtre tels que la pièce activiste Society of Construction des Allemands de Rimini Protokoll ; The Academy avec des conférences et des débats sur les thématiques sociales et économiques ; et pour finir The Playground, une balade interactive à travers la ville.
Plusieurs bureaux belges ont été invités ou sélectionnés via le Call for Projects afin de participer à la Triennale. Le 27 septembre, Jo Taillieu a donné une conférence sur la Décroissance à l’occasion de la Journée norvégienne de l’Architecture, tandis que BC Architectes ainsi que Laura Muyldermans et Bart Decroos présentaient des projets à l’expo centrale de la Triennale. Celle-ci s’articule autour de 4 axes : The Subjective Collection, constellation d’idées, de souvenirs et de perceptions ; The Objective Collection qui tourne autour de la matérialité de l’objet ; The Systematic Collection qui identifie et étudie les systèmes et réseaux qui sous-tendent les villes, les économies, les environnements ; et pour finir The Collective Collection, consacrée à ce qui nous relie et à la plus-value de la collaboration, de l’échange et du partage. Dans la première chambre « subjective » de l’exposition se trouve notamment le travail intitulé The inventory of experience/L’inventaire de l’expérience de Laura Muyldermans et Bart Decroos. Par le truchement du personnage fictif d’une riveraine, ils ont écrit des lettres à des architectes pour les questionner sur le ressenti lié à différents projets en cours d’exécution. Le résultat est une correspondance quasi intime qui tente de comprendre et de définir la qualité non quantifiable de l’atmosphère d’un lieu. Dans la chambre « objective » se trouvent trois petits tabourets en argile de BC architects, intitulés Same Same but Different. Cette installation montre la polyvalence de l’argile en tant que matériau de construction, qui peut acquérir un tout autre sens selon le contexte social. Chaque tabouret a été créé de manière différente, de sorte que chacun a un coût différent : du prototype réalisé dans le cadre d’un atelier d’étudiants (très cher) en passant par un objet design du circuit économique des galeries d’art (cher) jusqu’au bloc de construction pour le pavillon Peace de Case Design en Inde (exceptionnellement bon marché).
Ces deux projets montrent la portée du spectre dans lequel s’inscrivent des centaines de projets pour un monde plus juste, plus écologique et plus social, constituant ainsi une alternative aux instruments et aux vecteurs de la croissance économique exponentielle et destructive tels qu’on les connaît actuellement.